L’histoire entre l’homme et le «bâti» commence souvent par un coup de foudre, une envie impérieuse de posséder et d’investir un lieu unique inscrit dans l’histoire sur lequel son propriétaire laissera l’empreinte de son passage. Se pose alors la question de la réhabilitation, de la restauration du lieu et du choix des artisans. Le parti-pris de réhabilitation devra tenir compte de plusieurs paramètres. Le projet du propriétaire et les caractéristiques spécifiques du bâti devront guider le choix des intervenants professionnels.
Restaurer dans les règles de l’art impose la maîtrise et la connaissance des matériaux traditionnels. Mais aussi de leurs techniques de mise en oeuvre en adéquation avec le support. Chaque réhabilitation a ses propres spécificités. Il n’existe pas de recette universelle, chaque geste doit être effectué avec discernement. Chaque décision prise a des conséquences sur l’avenir du bâti. Pour que les actions menées ne soient pas destructrices de valeur patrimoniale et culturelle, le choix des artisans est primordial. Aussi, il doit toujours être motivé par la compétence, la connaissance et le savoir-faire reconnu.
Le respect de certains principes tels, que le diagnostic préalable et le choix des artisans ayant la connaissance des matériaux permet d’assurer la pérennité et la valorisation du patrimoine.
Le diagnostic est un préalable à toute action
Tout bâti ancien qu’il soit médiéval ou industriel mérite le regard d’un professionnel pour diagnostiquer les désordres et analyser le mode constructif dans son contexte historique et géographique. Cette étape de diagnostic préalable est essentielle dans le processus de réflexion au projet de réhabilitation qui sera déterminant pour la pérennité et la valorisation du bâti. Savoir quoi et comment observer pour livrer la meilleure analyse et prescrire le bon geste.
Le diagnostic du bâti doit tenir compte de son état sanitaire, de ses caractéristiques, de son environnement historique et géographique, de son fonctionnement thermique et des causes des désordres pour une évaluation des risques (structurels, géologiques, climatiques, de vétusté…). L’analyse de ces spécificités permet d’établir une sorte de photographie d’ensemble mettant en exergue l’histoire et les pathologies observées induisant des préconisations de restauration ou de réhabilitation.
C’est le diagnostic préalable qui pose les fondements de la méthodologie, des modalités et techniques d’intervention que les artisans devront respecter. Dans le domaine de la restauration de l’ancien, il est toujours difficile d’établir un devis. Derrière les murs recouverts de ciment, de plaques de plâtre, on trouve souvent des «surprises» que l’on ne peut pas anticiper avant le démarrage de l’intervention. Les devis se font alors par étapes avec l’accord du client.
Connaissance et observation
Chaque édifice a son histoire et a été construit suivant des règles guidées par le contexte géologique et géographique qui prend en compte une implantation déterminant le choix des matériaux de construction. Les anciens savaient construire avec bon sens. Prenons l’exemple d’une demeure du XVIIIe située en région Parisienne édifiée en pierre et recouverte d’un enduit à la chaux. La mode des pierres apparentes commande de «décrouter» les enduits anciens, au delà du parti pris esthétique indiscutable, ces maisons prévues pour recevoir un enduit se retrouvent, leur épiderme arraché, mises à nu, exposées aux intempéries et à des désordres et dégradations précoces. L’utilisation des enduits permet de protéger la construction. Encore faut-il connaitre le support pour une application adéquate avec la bonne formulation. Certaines maisons construites en pierre ou en brique ne sont cependant pas conçues pour recevoir un enduit. Là aussi c’est la connaissance et l’observation qui permettent d’analyser la pierre et son appareillage et déterminent si la pierre a été appareillée pour être vue ou recouverte.
Le nouveau propriétaire accompagné ou non d’un architecte qu’il soit spécialisé dans la restauration du patrimoine ou simplement architecte dplg se doit de rester attentif au choix des entreprises ou artisans qui vont intervenir sur son bien. Les choix des artisans n’est pas une décision que se prend à la légère.
Les artisans et les matériaux : l’identification de l’artisan compétent
Les compétences
- L’identification du bon artisan relève souvent du parcours du combattant. Le maître d’ouvrage doit alors s’entourer des compétences d’un architecte ou d’un assistant à maîtrise d’ouvrage. Ou encore des organismes référents qui peuvent le guider dans ses choix (syndicats professionnels, organismes de certification et de labélisation…). L’artisan sera sélectionné sur sa renommée, ses références, son ancienneté ou encore ses labélisations. (EPV, Qualibat, MH…) Ces éléments sont les signes de la reconnaissance par ses pairs et de sa capacité à respecter les règles de la restauration du bâti. Nous avons la chance en France d’avoir, encore aujourd’hui, des artisans aux savoir faire d’excellence. Pour vos travaux veillez à toujours exiger une garantie décennale.
- Un savoir-faire singulier et authentique. Seule l’expérience permet une restauration ou une réhabilitation réussie. La connaissance des bâtis anciens et l’utilisation de matériaux nobles et traditionnels tels que les bois durs, les chaux naturelles, les terres crues et cuites, la pierre de pays, les pierres marbrières sont les gages de restaurations harmonieuses et dans l’esprit de la région d’origine.
L’expertise
- La maîtrise des techniques et des matières permet la mise au point de matériaux sur mesure et exclusifs pour répondre à une demande particulière. Egalement pour intervenir sur tous travaux de restauration, de rénovation ou de décoration sur des bâtiments anciens ou même contemporains. Que ce soit pour la rénovation de votre maison, de votre appartement, ou tout l’amélioration de votre habitat tout en conservant l’aspect authentique, l’intervention doit être délicate et ciblée. Mais surtout, respecter les règles de l’art : c’est l’intelligence de la main qui fait la différence.
- Les constructions sont nées du terroir qui les portait. Pour le respect de l’expression culturelle, chaque intervention doit s’envisager dans le respect de «l’âme» du bâtiment qui s’inscrit dans une histoire, dans une culture régionale qui constituent le patrimoine d’une région. Et plus largement qui participent à l’identité de la France pays d’excellence. Les artisans sachant répondre aux exigences de ces interventions maîtrisent les matériaux et les techniques. De plus, ils utilisent les sources locales de pierres extraites de référence des carrières de proximité, de silex, de briques, de sable, de pigments… Cette démarche éco-citoyenne s’exprime également dans la combinaison des matériaux de construction anciens avec les matériaux de restauration. La réutilisation de cheminées anciennes, parquets anciens, terres cuites, ferronnerie et autres inscrivent le projet de restauration dans un principe de développement durable. La construction, comme le choix des matériaux, sont le marqueur d’une expression culturelle.
Les matériaux
- Des matériaux en adéquation avec leur support. Le choix des matériaux est fondamental pour la réussite d’une restauration durable et doit donc se porter sur des matières qui ont prouvé leur pérennité et leur stabilité dans le temps. L’étape de la mise en oeuvre est primordiale et doit être confiée à des artisans spécialisés. La mauvaise utilisation des matériaux peut entrainer des dommages irréversibles. Par exemple, l’utilisation massive du ciment et autres textures inappropriées qui ont recouvert nos façades et nos intérieurs provoquent le pourrissement par remontée d’humidité et l’étouffement des boiseries et des maçonneries dévastant ainsi notre patrimoine architectural. Le principe de base à respecter est de choisir les matériaux en fonction du support et des liants toujours respirants. L’artisan averti optera de préférence pour les matériaux de proximité gages d’authenticité et des matériaux sans danger pour les habitants et pour l’environnement.
Des alternatives écologiques
- La réponse aux exigences d’un monde moderne par l’écoconstruction. Actuellement, 25% des émissions de gaz à effet de serre et la moitié de la consommation énergétique en France sont générés par le secteur du bâtiment. Bien que très fortement consommateur, ce secteur présente l’avantage de posséder un vrai potentiel d’économie d’énergie. Cela est évident pour les constructions neuves, mais aussi pour la rénovation. Le savoir-faire et la connaissance des modes constructifs utilisés par les anciens permettent d’apporter de nouvelles solutions aux questions de confort indispensable à notre vie actuelle. Isolation phonique et thermique, matériaux écologiques performants… et cela dans le respect de l’existant.
Il s’agit ainsi d’élaborer des stratégies écologiques appropriées aux besoins contemporains de confort et d’économies d’énergie. Cela, en respectant la réglementation et en préservant l’équilibre et l’identité des habitations. Notamment par l’utilisation de matériaux issus du monde végétal, minéral ou du recyclage. Comme des matériaux tels le chanvre, le liège, le lin, le bois, la terre, la chaux, le gazon, le coton, le papier… On peut les trouver sous des formes aussi diverses qu’en laine, en vrac ou en panneaux ….
Exemples de matériaux respectueux
Ces matériaux permettent de combiner modernité et tradition, quelques exemples :
– les enduits traditionnels pour isoler les façades, les murs et les sols. Ils permettent de limiter les consommations énergétiques des habitations (chaux, badigeons, enduits à l’argile);
– les isolants écologiques pour l’aménagement des combles (laine de chanvre, de mouton, ouate de cellulose, bois, liège). Ils sont utilisés aussi pour l’isolation extérieure des façades orientées au nord et à l’ouest;
– les matériaux recyclés offrent une meilleure isolation thermique et acoustique que les matériaux couramment utilisés comme la laine de verre;
– les terres crues utilisées en torchis, pisé ou briques constituent une enveloppe isolante écologique traditionnelle;
– les terres cuites, quant à elles combinent esthétisme et isolation.
Toutes ces techniques existent depuis toujours et c’est l’artisan par son expérience qui en est le garant. La restauration du bâti ancien, selon des techniques et des matériaux traditionnels et écologiques, présente des bilans environnementaux très positifs. Ces matériaux génèrent des impacts sur la santé nettement moins importants que ceux utilisés couramment dans la construction. Le diagnostic complet du bâti, la compétence avérée des artisans et la mise en oeuvre de matériaux qu’ils soient traditionnels ou innovants sont les trois piliers d’une restauration réussie.